Protéger – Alerter – Secourir : premiers gestes essentiels dans la survie d’une victime en spéléologie

Ces dernières années dans le Vercors, deux opérations de secours concernant des blessures graves (traumatismes crâniens en particulier) ont connu des fins heureuses par l’action déterminante des équipes médicales mais aussi grâce aux premiers gestes des compagnons d’exploration des victimes.

En spéléologie, vu les conditions et les temps d’intervention, l’issue d’une opération de secours dépend beaucoup des deux premières étapes, protéger et alerter. Bien protéger le blessé et communiquer aux secours les informations nécessaires à un départ efficace de la « cavalerie ».Ces premiers gestes étaient intégrés cette année, dans le contenu du stage technique des 25 et 26 juin derniers. Il s’agit d’extraire la victime à la cause de l’accident, de faire un premier bilan et de la mettre en situation d’attente le plus confortablement possible puis de transmettre l’alerte. Le but étant de faire en sorte que son état ne s’aggrave pas en attendant l’arrivée du médecin. Ces premiers gestes s’inscrivent dans la démarche PROTEGER – ALERTER – SECOURIR (P.A.S.).

Avant l’accident

De nos jours, rares sont les spéléos à sortir avec un éclairage acétylène, grâce aux progrès des LEDs et des accus. Mais cela prive le spéléo d’un moyen de chauffage en cas de pépin. Il est important donc de progresser avec une bougie longue durée (et son briquet), de préférence sur soi. A compléter bien entendu avec au moins une couverture de survie. Si chaque participant à une sortie dispose d’une bougie, d’une couverture de survie, alors à trois vous disposez de quoi faire un beau point chaud.

Juste après l’accident

Protéger
Avant de se précipiter, comprendre les circonstances de l’accident et évaluer les risques : chutes de pierres, rupture d’amarrage, risque de cordes sans noeud …
Assurer sa sécurité et celle des autres participants en fonction de la situation.

Retirer la victime de la cause de l’accident en se préservant :

  • dégagements d’équipiers (décrochement) ;
  • sortir la victime de l’eau pour éviter la noyade.

Gestes conservatoires
Effectuer le bilan des fonctions vitales et des lésions du blessé : voir plus bas.
Suivant son état effectuer les premiers gestes de secours en fonction de la formation reçue. Par exemple, sans être exhaustif :

  • Installer le blessé sur le côté si il ne vous répond pas et qu’il respire.
  • Stopper les hémorragies : il n’est pas question ici de détailler les techniques mais il est évident qu’il faut limiter voire stopper les saignements. Suivant votre niveau en secourisme, vous vous contenterez d’appuyer là où cela saigne ou vous appliquerez les techniques que vous avez apprises lors de stages de secourisme. Eventuellement, vous mettrez en place un pansement de fortune.
  • Installer le blessé dans une position confortable et la plus adaptée à la situation en respectant la victime et le contexte. Il faut savoir que naturellement, une personne blessée aura tendance à s’installer dans la position qui lui est la moins douloureuse.
  • Immobiliser un membre fracturé ou déformé : Immobiliser ne veut pas forcément dire poser une attelle mais simplement poser le membre sur un “coussin” (cordes, kits, etc) pour maintenir un pied par exemple. Pour toutes les fractures, une traction très douce dans l’axe du membre provoque le plus souvent un soulagement de la douleur mais une fois commencée, cette traction ne doit pas s’arrêter !
  • Eviter l’hypothermie : le point chaud. Il s’agit de confectionner :
    • une tente avec des couvertures de survie et de la ficelle ou de la corde,
    • un tapis de sol avec de la corde et des kits,
    • un point de chauffage (bougie, lampe acéthylène)
      afin d’obtenir un lieu confortable et chaud pour que la victime attende les secouristes dans les meilleures conditions.

Alerter
Avant de foncer donner l’alerte, il est important de se calmer et faire un bilan le plus complet possible; le secours spéléo n’a rien à voir avec un accident de la route.

L’alerte doit être la plus complète, elle doit permettre au témoin de communiquer un maximum d’informations quant au blessé, au milieu et au contexte de l’accident.

Le blessé (le bilan) :
collecte d’informations essentielles à l’envoi des moyens nécessaires à une prise en charge efficace.

  • Tout d’abord de qui s’agit-il :
    • âge, sexe, nom, prénom, club, niveau de pratique

 

  • De quoi s’agit-il ?
    • circonstances de l’accident,
    • hauteur de chute,
    •  …

 

  • Ensuite, les données de base sur son état :
    • Répond-elle aux questions ?
    • Peut-elle bouger tous ses membres ?
    • Sa respiration est-elle normale ?
    • Le pouls bat-il au poignet ?
    • A-t-elle des blessures évidentes ?
    • Est-elle en train de s’affaiblir ?

 

  • Le contexte général :
    • la cavité :
      • quel est le lieu de stationnement des véhicules ?
      • quel est l’accès le plus commode ?
    •  la situation de la victime :
      • à quelle profondeur se situe-t-elle ?
      • quel est le temps de progression jusqu’à elle ?
      • existe-t-il des passages posant problème pour l’évacuation ?
      • est-elle en sécurité ?
      • est-elle installée dans un point chaud ?
      • est-elle accompagnée ?

Qui appeler ?

  • le 112
  • il faut demander à être mis en contact avec un Conseiller Technique spéléo. À défaut, il faut chercher à contacter directement un des CT.

Que faire après ?

  • il convient d’attendre à coté d’un téléphone, le CT pourrait avoir besoin de plus d’informations. Il faut en profiter pour se reposer et manger, la première équipe de secours aura peut être besoin d’un guide en surface ou sous terre.

Pendant le sauvetage

Secourir : ce sont les techniques d’évacuation qui seront mises en oeuvre par les équipes du spéléo secours… Le sujet est vaste et ne sera pas traité ici.

Conclusion

Les minutes qui suivent un accident sont primordiales, il faut que chaque spéléologue en soit conscient. On peut se préparer à cela en ayant sur soi un minimum de matériel pour confectionner un point chaud (couverture de survie, bougie, briquet, ficelle), en ayant acquis un minimum de connaissance en secourisme, en techniques de dégagement.

Des associations de secourisme comme la Croix Rouge Française organisent plusieurs fois par an des formations au PSC1 (Prévention et Secours Civiques de niveau 1) qui remplace depuis 2007 l’AFPS (Attestation de Formation aux Premiers Secours). Ces formations durent une dizaine d’heures et permettent de bien maitriser le principe du P.A.S. et les quelques gestes qui permettront à votre collègue de se sortir d’une situation délicate en cas d’accident sérieux.

Merci à Sylvain Amolini, Laurent Hyvert et Benoît Joly pour leurs idées et corrections.